Collaboratrice : Teresa Kloning, Infirmière de soins intensifs en Allemagne et dans une équipe chirurgicale mobile du Comité international de la Croix-Rouge (CICR)
À l’occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, 10 octobre, nous vous présentons l’histoire, au Soudan du Sud, d’un homme blessé dont le processus de guérison mentale et physique est soutenu par des infirmières bienveillantes du CICR.
Le CICR dispose d’une équipe solide de collaborateurs œuvrant en étroite collaboration avec le Ministère de la santé du Soudan du Sud pour dispenser des soins de santé gratuits à la population civile et aux combattants blessés. Organisation impartiale et neutre, le CICR aide et traite indifféremment chaque personne, quelle que soit son origine.
Dans la capitale du Soudan du Sud, au cours du troisième trimestre de 2020, 52 patients au total ont été admis à l’Hôpital militaire de Djouba. Les traitements fournis comprenaient des soins chirurgicaux, des soins infirmiers, de la radiologie, de l’analyse de laboratoire, un soutien en matière de santé mentale, de l’appui économique, de la rééducation physique et le rétablissement des liens entre les membres de la famille, séparés en raison du conflit.
L’équipe de soins infirmiers est impliquée à tous les niveaux du traitement des patients. Trois infirmières étrangères travaillent dans la salle d’opération, l’unité de soins intensifs et en salle, pour aider leurs collègues locaux et du Ministère de la santé à appliquer les normes du CICR en matière de sécurité des soins et d’hygiène. Partout dans le monde, les infirmières sont le plus étroitement en contact avec les patients. Elles peuvent évaluer et contrôler si l’état physique et mentale du patient est stable, s’améliore, ou se détériore.
En juin 2020, au plus fort de la pandémie mondiale de COVID-19, G.K., un homme de 33 ans, a été blessé par balle à l’abdomen. On l’a laissé dans son village pendant cinq jours avant qu’il ne soit emmené dans un hôpital voisin. G.K. a été transféré à l’Hôpital de Djouba, soutenu par le CICR. Après trois opérations, il a été testé positif à la COVID-19 et immédiatement isolé. Il a réagi positivement au traitement et a été déclaré négatif après 21 jours.
En raison de ses blessures et de leurs complications, le patient a eu du mal à accepter la longue période d’attente avant l’ultime opération. L’équipe de santé mentale a joué un rôle important en lui apportant son concours. Pour réduire la distance avec ses êtres chers, l’équipe du CICR a organisé un appel par satellite pour qu’il puisse parler avec sa famille, ce qui lui a mis du baume au cœur. Pourtant, il continuait de s’inquiéter de ne pouvoir retrouver une vie normale un fois sorti de l’hôpital. Il refusait de s’alimenter et perdait du poids. L’équipe a observé qu’il se levait à peine de son lit et communiquait rarement avec les autres patients ou le personnel.
L’infirmière étrangère de l’unité de soins intensifs a décidé d’organiser des activités avec les patients, avec masques et gestes barrières, pour essayer de remonter le moral des personnes hospitalisées. Commençant avec le seul enfant hospitalisé et son aide-soignant, elle a distribué des morceaux de craies de couleur aux patients ; ils se sont alors mis à dessiner des vaches, des crocodiles et des hélicoptères du CICR sur le sol à l’extérieur de l’hôpital. L’infirmière a invité G.K. – par les gestes, comme ils n’avaient pas de langue commune – à l’accompagner dehors. À sa grande surprise, il l’a suivie, s’est assis en retrait sur une chaise et a observé. Le collègue spécialisé dans la santé mentale échangeait avec les patients et les encourageait à continuer de dessiner. G.K. s’est vu offrir un morceau de craie. Il a d’abord dessiné un poisson, puis une vache, qu’il a baptisé de son nom. Peu après, il est rentré se brosser les dents et souriait en mangeant.
L’infirmière s’est organisée pour qu’il reçoive tous les jours un verre de jus d’hibiscus local, dont on considère qu’il donne de la force. Il buvait le jus et mangeait un peu plus chaque jour. S’ouvrant plus aux autres et recommençant à s’alimenter, les signes de détresse physique et mentale se sont nettement réduits et il a repris du poids.
C’est grâce à l’intervention attentive des infirmières de l’unité de soins intensifs, qui ont fait preuve d’empathie à l’égard des patients atteints psychologiquement, qui ont répondu à leurs besoins et se sont rapprochées d’eux pour qu’ils puissent s’exprimer un fois qu’ils se sentaient prêts, que G.K. s’est engagé sur la voie de la guérison.